La valeur de la mesure d’impact réside dans les économies qu’elle transforme

Laissez-moi vous faire part d’un fait amusant : à ma naissance, 3 milliards de personnes peuplaient la planète. Aujourd’hui, nous sommes bien plus de 7 milliards. Quand je mourrai, nous serons entre 9 et 10 milliards d’êtres humains sur Terre. La capacité de charge de l’espèce humaine se situe autour des 10 milliards.

En une vie, la population humaine sera passée d’un tiers à l’entièreté de sa capacité de charge sur la planète. Et alors que nous nous rapprochons toujours plus de ce maximum théorique, nos systèmes économiques, sociaux et écologiques sont indéniablement mis à rude épreuve et beaucoup finissent par s’effondrer. Pourtant, nous adhérons toujours au même principe fondamental de croissance économique, tel qu’il a été défini par Simon Kuznets en 1932 : le revenu national brut.

Kuznets a reçu le prix Nobel d’économie pour son travail en 1971. Mais il semble que nous ayons oublié un fait intéressant : dans le document que Kuznets a présenté au Sénat américain, dans lequel il définit le revenu national brut, il a averti ce dernier de trois limites à cette approche.

1.       La nécessité de distribuer équitablement ce revenu,

2.       Le fait que la productivité totale n’est pas pleinement reconnue (il prend comme exemple « les services rendus par les mères au foyer »),

3.       Le fait que l’accent soit mis sur le produit national brut (et non pas le produit national net) ne permet pas de prendre pleinement en compte toute une série de coûts (il avait bien anticipé le problème des embouteillages, par exemple).

Selon Kuznets, « Le bien-être économique ne peut être mesuré de manière adéquate que si l’on connaît la distribution individuelle des revenus. Aucune mesure du revenu ne permet d’estimer la contrepartie du revenu, c’est-à-dire l’intensité et le caractère désagréable de l’effort fourni pour l’obtenir. Le bien-être d’une nation peut donc difficilement être déduit de la mesure du revenu national tel qu’il est défini ici. »

Nous voici donc, 89 ans plus tard, en train de faire exactement ce qu’il nous avait conseillé d’éviter.

Pourtant, cette croissance générale s’accompagne d’une stabilité financière individuelle et de bien-être social. La situation a été aggravée par la pandémie de Covid-19. Nous sommes tels la grenouille dans l’eau bouillante face à l’augmentation inexorable du coût social :

  • Environ 3400 millions de personnes sont en situation de pauvreté relative,
  • L’endettement des ménages a atteint des niveaux sans précédent, et représente près de 200% du revenu disponible,
  • Les logements sont de plus en plus chers et notre ratio prix/revenu est l’un des plus élevés au monde : une « résolution désordonnée des problèmes » pourrait en entraîner d’autres,
  • Sans parler de l’externalisation des coûts du dérèglement climatique et de la dégradation de l’environnement, de l’impact de notre alimentation sur notre santé et de nos comportements en tant que consommateurs.

Je pourrais m’étendre sur ce sujet. La polarisation des idéologies n’a guère contribué à intégrer la rationalité dans les politiques publiques. Quelle que soit votre position sur le spectre « gauche-droite », une approche idéologique de la politique ne rend service à personne, à l’exception peut-être des 1% les plus riches du monde, dont la part du revenu mondial est passée de 5 à 10% au cours des dix dernières années. Plus que jamais, nous avons besoin d’éléments concrets pour équilibrer les débats.

Il a toujours été admis que, dans n’importe quelle population, la présence de nombreuses personnes n’ayant pas accès aux besoins de première nécessité nuit à la qualité de vie dans son ensemble. Voilà pourquoi nous disposons d’une sorte de « filet de sécurité sociale », afin de garantir que ceux qui se retrouvent exclus, pour quelque raison que ce soit, puissent accéder aux biens et aux services de première nécessité. 

Cependant, au cours des dernières décennies, le filet de sécurité sociale est devenu une « charge sociale » aux yeux de nombreuses personnes. Les gouvernements ont donc cherché à trouver des moyens de réduire le poids de ce « fardeau », sans tenir suffisamment compte a) de l’impact sur la population et b) de la reprise de ce « fardeau » par le secteur non lucratif.

C’est là que la mesure de l’impact social entre en jeu ! Ce travail essentiel permet de prendre suffisamment en compte le coût humain. Une bonne mesure de l’impact social devrait contribuer à une évolution positive des communautés et permettre, comme l’a souligné Kuznets, de déterminer le bien-être réel d’une nation.

C’est l’une des merveilleuses opportunités qui s’offrent à nous alors que nous commençons à imaginer un monde post-covid. Une bonne mesure de l’impact social peut grandement contribuer à orienter la reconstruction de l’économie mondiale, afin de s’assurer que les coûts humains soient suffisamment pris en compte et que l’esprit communautaire est valorisé au même titre que le pouvoir d’achat. De plus, en faisant cela, on veut s’assurer que l’équité est comprise dans un sens social aussi bien que dans un sens financier, et que l’on dispose d’un système économique adapté à un monde dans lequel une croissance économique illimitée se faisant au détriment d’une société équitable est considérée, à juste titre, comme un non-sens. 

Glossaire

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